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Photo du rédacteurAC Détection Canine

Vulgarisation scientifique - ADN environnemental : qui de la PCR ou du chien est le meilleur ?

How low can they go: A comparison between dog (Canis familiaris) and environmental DNA detection of invasive koi carp (Cyprinus rubrofuscus)

 

Introduction

Les carpes communes et koi, véritables ingénieurs de l'écosystème, ont la capacité de transformer radicalement les milieux aquatiques qu'elles colonisent. Particulièrement agressives dans leur expansion, les carpes koi excellent à supplanter les espèces indigènes, menaçant ainsi la biodiversité locale. Face à cette menace, une détection précoce s'avère cruciale pour lutter efficacement contre ces espèces envahissantes.

L’analyse de l’ADN environnemental (ADNe) est une technique de pointe qui permet d'identifier la présence d'une espèce en détectant des traces infimes d'ADN dans l'environnement aquatique. Cependant, son efficacité peut être compromise par divers facteurs environnementaux tels que la température, le pH et l'activité microbienne, qui influencent la persistance de l'ADN dans l'eau et le succès des analyses PCR.

Les chiens, dotés d'un système olfactif remarquablement développé, excellent dans la détection des composés organiques volatils (COV), même à des concentrations extrêmement faibles. Bien que cette méthode soit principalement associée aux écosystèmes terrestres, des études récentes ont démontré son potentiel prometteur dans les milieux aquatiques.

 

Question : Les chiens sont-ils capables de détecter la présence de carpe koi à des densités aussi faibles que les analyses de l’ADNe ?

 

Méthodes 

Un chien unique, croisé Labrador/Border Collie âgé de 8 ans, a été sélectionné pour cette expérience.


L'expérimentation s'est déroulée en laboratoire, utilisant un système entièrement automatisé pour éliminer l'influence potentielle du maître-chien (handler). Le dispositif comprend un carrousel contenant 17 échantillons d'eau (neutres, avec l'odeur cible carpe “koi", avec une odeur de poisson autre). Des couvercles hermétiques empêchent la dispersion des COVs. Le chien accède de lui-même à chaque échantillon et est récompensé grâce à un distributeur de croquettes contrôlé à distance.

Avant l’expérimentation, le chien a été entraîné sur ce système automatisé, avec récompense par un distributeur de croquettes contrôlé à distance. 

Lors de l’expérimentation, le chien réalisait quatre sessions de travail par jour. Lorsque les critères de succès de la détection étaient atteints, les odeurs cibles étaient diluées à nouveau. Ceci jusqu’à trouver le seuil minimal pour le succès de la détection, celui-ci a été observé lorsque le chien a échoué après 45 essais sur le même niveau de dilution. 


 

Résultats

Au total, le chien a réalisé 106 sessions de travail, chacune durant en moyenne 7 minutes, sur une période de 15 semaines, réparties sur 29 jours. Il a réussi à atteindre un seuil de détection de 0,2 mg de carpe par litre mais cela est nuancé par un taux de faux positifs et faux négatifs peu satisfaisant. Pour retrouver des critères de succès en accord avec ceux établis par les auteurs, il faut s'arrêter à 0.46mg/L. 

En ce qui concerne la méthode d'analyse de l'ADNe, les résultats obtenus par PCR ont montré qu’il était possible de détecter la présence de carpe à 0.46mg/L, dans plusieurs litres d’eau filtrée, mais à ce stade, les taux de succès de la PCR sont faibles. Le taux de succès est plus stable et satisfaisant à 8mg de carpe/L.

 

Discussion

Les deux méthodes, canine et ADNe, présentent des seuils de détection remarquablement similaires, capables d'identifier la présence de 2 à 4 carpes adultes par hectare de masse d'eau. Cette sensibilité est cruciale car elle permet une détection à des densités suffisamment faibles pour permettre une intervention efficace contre ces espèces envahissantes.

L'analyse de l'ADNe se révèle plus performante que les méthodes traditionnelles comme la pêche électrique ou le piégeage pour détecter de faibles populations de carpes. Cependant, cette technique présente des inconvénients notables : elle nécessite plusieurs heures pour l'analyse d'un seul échantillon et s'avère coûteuse.

Face à ces contraintes, les chercheurs proposent une approche novatrice pour optimiser la détection canine. Plutôt que de déployer le chien sur le terrain, ils suggèrent de lui présenter un grand nombre d'échantillons en laboratoire. Cette méthode offrirait plusieurs avantages :

  1. Réduction des coûts opérationnels

  2. Possibilité de tester de nombreux échantillons provenant de sites différents en une seule session

  3. Conditions de travail standardisées, permettant au chien de se concentrer uniquement sur la détection

  4. Amélioration potentielle des performances du chien grâce à cette focalisation

Cette approche en laboratoire pourrait non seulement accroître l'efficacité de la détection, mais aussi offrir une solution plus économique et pratique pour la surveillance à grande échelle des espèces aquatiques envahissantes. Elle combine les avantages de la sensibilité de la détection canine avec l'efficacité logistique d'un environnement contrôlé, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives dans la gestion des espèces invasives aquatiques.



Source : Melissa A. Collins, Clare M. Browne, Timothy L. Edwards, Nicholas Ling, Grant W. Tempero, Dianne M. Gleeson, Kymberly Crockett, Jesse Quaife, How low can they go: A comparison between dog (Canis familiaris) and environmental DNA detection of invasive koi carp (Cyprinus rubrofuscus), Applied Animal Behaviour Science, Volume 255, 2022, https://doi.org/10.1016/j.applanim.2022.105729.

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